Markus Flasch de BMW Motorrad : Entretien Exclusif

Poky, 1000PS : Markus, tu viens du secteur automobile, notamment de Rolls-Royce et BMW M. Qu'apportes-tu de cet univers à ton rôle chez BMW Motorrad ?

Markus Flasch : Ce qui est bien dans ce travail, cest que l'on peut diriger une entreprise au sein dun grand groupe avec beaucoup de liberté entrepreneuriale, mais aussi le soutien et la stabilité dun conglomérat mondial. Il faut juste faire attention à ne pas utiliser des "grosses cartouches" pour de petits problèmes. Nous voulons préserver la légèreté et la dynamique dune petite équipe.

Poky : Tu as travaillé avec le luxe chez Rolls-Royce. Y a-t-il des parallèles avec l'Option 719 chez BMW Motorrad, c'est-à-dire les équipements ultra-premium ?

Flasch : Non, c'est tout à fait différent. Rolls-Royce est un produit de pur luxe, alors que pour la moto, il s'agit toujours du produit de la fonctionnalité et de la technologie à mettre en avant.

Poky : Parlons de la R 1300 GS. Le démarrage a été difficile. Quelles leçons en avez-vous tirées ?

Flasch : "La principale leçon a été de ne pas modifier des éléments qui fonctionnent très bien s'ils n'apportent pas de bénéfice supplémentaire aux clients. Nous avons trop changé de choses sans que personne ne le demande cela a saturé l'organisation. Des erreurs ont été commises, que nous avons toutes corrigées. Cependant, ce n'est jamais agréable d'avoir à amener une nouvelle moto à l'atelier de façon imprévue. Ce qui m'a impressionné, c'est que la communauté est toujours entièrement derrière nous. De nombreuses plaintes se terminaient par : "malgré cela, meilleur produit, meilleure marque". Cela montre la robustesse de notre base. Mais, bien sûr : nous en avons tiré des enseignements."

Poky : Par le passé, les opérations de service étaient discrètes, mais aujourd'hui, les clients exigent de la transparence. BMW Motorrad va-t-il informer plus activement à l'avenir ?

Flasch : Nous avons des processus qui s'inspirent fortement de l'automobile c'est le plus haut standard de qualité de l'industrie. Aucun autre fabricant de motos ne gère les problèmes sur le terrain aussi professionnellement. Selon le sujet, nous décidons si les clients sont directement informés ou si des mesures sont mises en œuvre lors du service. Ce qui est crucial : aucun client de BMW Motorrad ne reste seul face à un problème. Si un moteur doit être remplacé, il le sera peu importe le coût.

Poky : Passons au sport automobile : la perte de Toprak Razgatlıolu après cette saison doit être particulièrement douloureuse. Dans quelle mesure cela vous affecte-t-il, et comment réagissez-vous stratégiquement ?

Flasch : Cest la vie. Toprak a sa carrière, nous avons nos intérêts. La collaboration a été extrêmement réussie. Mais quand quelqu'un a sa dernière chance de rejoindre à nouveau la MotoGP, on ne peut pas lui en vouloir. Je l'ai félicité et lui ai dit : "Vas-y !" Nous ne paniquons pas cela fait partie du jeu. Qui sait quand on se retrouvera ?

Poky : La M 1000 RR est très proche des superbikes de série. À quel point le développement en série bénéficie-t-il du sport automobile ?

Flasch : Énormément. Les équipes à Munich qui travaillent sur la prochaine Double-R sont étroitement liées au sport automobile. Elles assistent aux mêmes réunions, mangent à la même cantine et échangent des données. Le World Superbike est pour nous parfait pour démontrer notre technologie et prouver notre compétence bien plus proche du produit que d'autres séries de courses.

Poky : Tu avais dit auparavant que la MotoGP n'était pas à l'ordre du jour pour le moment. Cependant, avec les nouvelles règles, beaucoup de choses changent. BMW envisage-t-il quand même cette possibilité ?

Flasch : Le sujet est sous surveillance chez nous. Nous sommes en contact avec des équipes et la Dorna. Bien sûr, tout le monde veut voir BMW en MotoGP, je le comprends. Mais un tel pas doit se faire au bon moment et les conditions économiques doivent être favorables. Le marché mondial de la moto a diminué de huit pour cent au premier semestre 2025. Nous avons gagné des parts de marché. Dans un marché en déclin, le timing pour d'importants investissements est crucial. Nous n'avons pas écarté ce sujet, mais nous avançons prudemment.

Poky : Quelles expériences du sport automobile te sont utiles dans le secteur motocycliste ?

Flasch : J'ai appris que la force de la marque et la communauté dépendent fortement des succès en sport automobile et de la crédibilité. Cest pourquoi le sport automobile est solidement ancré chez BMW. Nous avons réintégré M GmbH et le sport automobile, car les deux sont indissociables. Pour la moto, c'est pareil : le sport automobile n'est plus une note en bas de page avec la question du budget, mais fait partie intégrante de la marque.

Poky : Passons aux produits. La nouvelle F 450 GS est la seule véritable nouveauté mondiale pour 2026. Dans quels segments vois-tu un potentiel de croissance ?

Flasch : Nous allons continuer à renforcer nos atouts surtout dans le domaine Adventure. L'attrait de nos modèles GS reste intact, et ceux qui rejoignent la famille y restent généralement. Entre 450 et 900 cm³, il y a encore de la place pour la croissance, et nous y travaillons. Une montée en gamme de la 1300 GS est également prévue, en termes de performance sportive. Mais aussi dans d'autres segments : nous avons annoncé l'arrivée de la R 20 tout en haut de notre gamme. Le six cylindres est également un sujet que nous voulons renforcer au cours des prochaines années.

Poky : Cela signifie-t-il que le concept R 20 continue d'exister ?

Flasch : Oui, j'ai déjà piloté la moto. Nous sommes en phase de prototype, les premiers modèles sont en cours de test. Le moteur est fantastique deux litres de cylindrée, une réactivité propre à un Boxer de gros volume, avec en plus un son génial. La communauté peut s'attendre à un produit extrêmement puissant.

Poky : Et enfin : avec la F 450 GS, BMW s'adresse aussi aux jeunes pilotes. Peut-on s'attendre à voir plus de modèles sur cette plateforme ?

Flasch : Réponse courte, oui. (rires)